- Philosophie
- conte, mer, destin, plage
Cette femme cheminait, le front bas, sur la plage, le long de l'océan. De temps en temps elle se penchait, elle ramassait au bord des vagues, sur le sable, on ne savait quoi et le jetait au loin dans l'eau. Un promeneur qui l'observait vint à elle, il la salua, puis:
- Que faites-vous? lui dit-il.
- Vous le voyez, répondit t-elle, je rends à l'océan des étoiles de mer. La marée les a amenées, elles sont restées là, sur le sable, et je dois les remettre à l'eau, sinon c'est sûr, elles vont mourir.
Le promeneur, surpris, lui dit:
- Des étoiles de mer, rien que sur cette plage, il y en a des milliers. Et le long des côtes du monde, combien de millions de ces bêtes, que vous ne pouvez pas sauver, s'échouent tous les jours sur le sable? Mourir ainsi est leur destin, et vous n'y pouvez rien changer.
La femme ramassa une étoile, la tint un instant dans la main.
- Oui, sans doute, murmura-t-elle.
Et ajouta, en la rejetant dans les vagues:
- Mais pour elle, ça change tout.
Petits contes de sagesse pour temps turbulents
Henri Gougaud
Bien qu'il fut encore enfant, le roi dû passer la nuit dans la forêt pour prouver son courage et devenir un vrai roi. Tandis qu'il passe la nuit tout seul, il est l'objet d'une vision. Sortant du feu apparaît le Saint Graal, symbole de Dieu et de Sa grâce. Une voix dit à l'enfant: « C'est à toi que je vais confier le Saint Graal, afin qu'il puisse guérir le coeur de l'Homme. » Mais l'enfant était aussi aveuglé par d'autres visions... le rêve d'une vie de pouvoir, de gloire, et de beauté. Alors dans un état de stupeur complète, il se sent un bref moment non plus un enfant, mais invincible, comme Dieu lui-même. Il tend la main vers le feu pour saisir le Graal, mais l'objet sacré disparaît. Il laisse la main dans le feu, mais ressent bientôt une terrible brûlure. Le jeune enfant grandit et sa blessure grandit en meme temps. Jusqu'au jour où il n'a plus de raison de vivre. Il n'a plus foi en l'Homme, pas plus qu'en lui meme. Il ne peut plus aimer ni ne sentir aimer... Il est las de la vie ici-bas. Il se laisse mourir.
Un jour un bouffon qui errait dans le château trouva le roi seul. Étant bouffon et d'esprit simple, il ne voit pas en lui un roi. Il ne voit qu'un homme solitaire, qui souffre. Il dit au roi:
« Qu'est ce qui te fait souffrir ? »
Le roi répond seulement:
« Je meurs de soif... je veux un peu d'eau pour me rafraichir... »
Alors le bouffon prend une coupe placée au pied du lit et la remplie d'eau. Il la tend au roi. Dès que le roi commence a se désaltérer, il s'aperçoit que sa blessure est guérie. Il regarde dans ses mains, et que voit-il? Le Saint Graal qu'il avait cherché toute sa vie! Stupéfait, il se tourne vers le bouffon et lui dit:
« Comment as-tu pu trouver ce que mes plus valeureux preux chevaliers n'ont su trouvé? »
Candide, le bouffon réplique:
« Je n'en sais rien ... J'ai seulement su que tu avais soif ... »
Parti de rien, je suis arrivé à pas grand chose.
Groucho Marx